Communiqué de presse

La Cour des comptes remet à la Défenseure des droits son rapport sur les contrôles d’identité, évalués à 47 millions

06 décembre 2023

  • Déontologie de la sécurité
  • Droits fondamentaux

Le Gouvernement doit impérativement mettre en place une politique publique qui apporte les garanties nécessaires pour encadrer cette pratique, aujourd’hui massive.

La Défenseure des droits reçoit ce jour le rapport de la Cour des comptes sur les contrôles d’identité, à la suite de sa demande formulée en mai 2022, afin d’évaluer leur nombre et leur efficacité dans le cadre de la politique publique de sécurité. Face au recours massif aux contrôles d’identité qui y est révélé, elle appelle à la mise en place d’une politique publique à la hauteur des enjeux pour le respect des droits et libertés et pour l’amélioration des relations entre police et population.

Les conditions du recours au contrôle d’identité, une mesure de contrainte et de privation de liberté d’aller et venir, sont un sujet de préoccupation majeur depuis la création du Défenseur des droits.

Le rapport de la Cour des comptes, intitulé « Les contrôles d’identité : Une pratique généralisée aux finalités à préciser » constate de manière inédite la place centrale des contrôles d’identité dans les actions de la police et de la gendarmerie nationales : le nombre de contrôles réalisés en 2021 en France est évalué à près de 47 millions dont 15 millions de contrôles routiers.

Face à une telle ampleur, alors même que la pratique des contrôles d’identité est régulièrement questionnée dans le débat public depuis des années, l’absence de recensement exhaustif des contrôles d’identité et d’évaluation de ceux-ci en termes de finalités, de nécessité opérationnelle et d’efficacité apparaît plus que jamais incompréhensible.

Le rapport soulève notamment, à l’instar des travaux menés par le Défenseur des droits : 

  • un cadre légal complexe et imprécis, 
  • une pratique non ou mal mesurée, 
  • des objectifs poursuivis et des conditions de réalisation peu définis, 
  • un manque d’encadrement par la hiérarchie de proximité, 
  • une absence d’appréciation globale par les inspections générales, 
  • un contrôle très imparfait par le parquet, 
  • une formation initiale et continue des agents insuffisante.

Or, de telles insuffisances sont de nature à rendre possibles des dérives dans les pratiques quotidiennes des contrôles d’identité, des comportements contraires à la déontologie de la sécurité notamment discriminatoires par les forces de l’ordre, alors même que la Cour de cassation, et le Conseil d’État (décision 2023-165) récemment, reconnaissent l’existence de pratiques de contrôles d’identité discriminatoires. En 2017 déjà, l’enquête « accès aux droits » du Défenseur des droits relevait : « Par rapport à l’ensemble de la population et toutes choses égales par ailleurs, les jeunes hommes qui sont perçus comme arabes/maghrébins ou noirs ont une probabilité 20 fois plus élevée d’être contrôlés que les autres ».

À la lumière des études et rapports réalisés depuis des années mettant en évidence une surreprésentation d’une partie de la population dans ces contrôles, le chiffre massif de 47 millions de contrôles doit donc conduire les pouvoirs publics à se saisir de la question des comportements discriminatoires dans la mise en œuvre des contrôles d’identité.

Pour la Défenseure des droits, le recensement, l’évaluation comme la traçabilité des contrôles d’identité revêtent un enjeu de mesure de l’ampleur des atteintes aux droits et libertés. La traçabilité tout particulièrement constitue un outil indispensable permettant la contestation d’un contrôle discriminatoire. Outre la possibilité d’un recours, l’enjeu est de favoriser le changement des pratiques.

La Défenseure des droits appelle le Gouvernement à mettre en place une politique publique sur les contrôles d’identité qui apporte les garanties nécessaires pour encadrer une pratique aujourd’hui mal évaluée et peu contrôlée.

Les pouvoirs conférés aux forces de l’ordre doivent être suffisamment encadrés. La question de la supervision par la hiérarchie et de la formation initiale et continue sont également fondamentales.

Il y a urgence dans un contexte où les relations entre la police et la population sont fortement mises à mal alors même qu’elles constituent un facteur essentiel de cohésion sociale.


Contact presse :

Laetitia GOT Chargée de mission presse
01 53 29 22 79 / 06 20 50 34 46
laetitia.got@defenseurdesdroits.fr