Les thèses primées

14 novembre 2024

Depuis 2015, les thèses suivantes se sont vues récompensées par le prix de thèse du Défenseur des droits

Prix de thèse 2024

En 2024 le jury du prix de thèse était composé de :

  • Pierre-Yves BAUDOT, professeur de sociologie, Université Paris-Dauphine ;
  • Lucie CLUZEL-METAYER, professeure de droit public, Université Paris-Nanterre ;
  • Thierry DELPEUCH, chercheur CNRS, UMR Pacte, Université Grenoble Alpes ;
  • Pascale DEUMIER, professeure de droit privé, Université Jean Moulin Lyon 3 ;
  • Danièle LOCHAK, professeure émérite de droit public, Université Paris-Nanterre ;
  • Elise PALOMARES, professeure de sociologie, Université de Rouen ;
  • Delphine THARAUD, professeure de droit privé et sciences criminelles, Université de Limoges ;
  • Vincent TIBERJ, professeur de sociologie politique, Sciences Po Bordeaux ;
  • Pascal TISSERANT, maître de conférences en psychologie sociale, Université de Lorraine – Metz.
  • Arthur VUATTOUX, maître de conférences en sociologie, Université Sorbonne Paris Nord ;

« Le critère de la richesse des particuliers en droit public français » 

Thèse de droit public de Sarah Philibert, réalisée sous la direction de Gweltaz Eveillard, et soutenue le 14 décembre 2023 à l’université de Rennes.

Cette thèse montre la réception par le droit public d’un concept économique, la richesse, et les conséquences de cette réception sur les particuliers dans l’exercice de leurs droits et libertés.

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Titre : « Le critère de la richesse des particuliers en droit public français », par Sarah Philibert (co-lauréate du prix de thèse du Défenseur des droits)
Sarah Philibert, Maîtresse de conférences en droits public. – Paris 1 Panthéon Sorbonne
Comme dans ma thèse je parle beaucoup de la question du principe d'égalité en droit je me suis dit que ça pouvait quand même se rattacher au prix thèse du Défenseur des droits.
J'ai voulu avoir une vision transversale de la richesse en droit public, à la fois en droit fiscal, en droit de l'aide sociale et en droit des services publics. L'objectif c'est d'importer un concept économique, la richesse, en droit public. De montrer comment le droit public utilise ce concept économique pour construire des catégories juridiques et de montrer aussi comment le droit pourrait mieux justement apprécier cette richesse par l'outil juridique ?
Question : Pourquoi avoir choisi ce sujet ?
Ce que j'ai observé c'est qu'il y a il n’y a pas beaucoup, en droit public, de volonté d'avoir une vision transversale de la richesse. En fait, la richesse en droit public est examinée d'un point de vue fiscal par les juristes de droit fiscal, par les juristes qui sont plutôt spécialisés en droit de l'aide sociale et puis un peu par ceux qui font du service public. Mais il y a pas du tout de volonté d'avoir une réflexion globale, transversale, cohérente de la richesse des particuliers. Et donc c'est là que je me suis rendu compte que c'était nécessaire justement pour résoudre…, chercher à résoudre en tout cas, la question des inégalités économiques et sociales.
Quelles sont vos principales conclusions ?
Les principales conclusions de ma thèse c'est que la richesse ne présente pas d'homogénéité matérielle en droit public mais qu'en revanche elle répond à une unité fonctionnelle puisque la richesse est toujours utilisée en droit public pour la même fonction la fonction de redistribution sociale. Donc, ça c'est ma première partie où je démontre que le critère de la richesse existe bien en droit public. Dans ma deuxième partie j'apprécie de manière critique son utilisation en montrant que ce critère pourrait être mieux utilisé par le droit public.
Il y a plusieurs éléments dans ma thèse qui pourrait permettre de mieux apprécier la richesse des particuliers dans la construction des politiques publiques on pourrait parler par exemple de la question du couple qui n'est pas apprécié de la même manière en droit fiscal et en droit de l'aide sociale par exemple le fait d'être en concubinage va être pris en compte dans le cadre de l'imposition sur la fortune mais n'est pas pris en compte ni dans le cadre de l'imposition sur le revenu ni dans le cadre de l'attribution des aides sociales.
Qu’espérez-vous avec ce travail ?
Dans mon idéal les ma thèse servirait en fait à la construction des politiques publiques pour mieux prendre là où il y a à prendre et mieux redistribuer là où il faut redistribuer, de mieux apprécier la richesse pour construire les politiques publiques. Dans ce sens-là après c'est aussi une volonté politique.
Que représente ce prix de thèse ?
Le fait d'avoir le prix de thèse du Défenseur des droits ça représente pour moi le fait que mon sujet de thèse n'est pas un sujet de niche qui n'intéresse que des juristes, au contraire. Ca me réconforte dans l'idée que je me suis attaquée à un sujet de société et en fait qu'on a besoin d'avoir une réflexion je pense globale sur ce que c'est que la richesse des particuliers. Je suis très honoré de de cette récompense.

« Quand la race fait école : place et rôle de la race dans l’activité professionnelle des enseignants des territoires hyper-paupérisés »

Thèse de Sciences de l’éducation de Laura Foy, réalisée sous la direction de Nicolas Sembel, et soutenue le 24 mars 2023 à Aix-Marseille Université.

Cette thèse porte sur les processus de racialisation des publics dans les écoles du réseau d’éducation prioritaire renforcé de Marseille.

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Titre : « Quand la race fait école : place et rôle de la race dans l’activité professionnelle des enseignants des territoires hyper-paupérisés », par Laura Foy (co-lauréate du prix de thèse du Défenseur des droits)
Question : Quels sont les principaux enjeux ?
De manière générale la question raciale fait l'objet d'un tabou assez généralisé en France et plus encore dans le champ scolaire et donc je ne m'attendais pas à ce qu’un travail portant sur cette thématique puisse faire l'objet d'une reconnaissance institutionnelle.
J'ai travaillé sur la manière dont la question raciale était incorporée intégrée à l'activité professionnelle des enseignantes dans les écoles du réseau d'éducation prioritaire renforcée de Marseille.
Ce que j'ai constaté quand j'ai commencé ma thèse c'est que la thématique raciale était omniprésente dans les écoles et qu’elle s'articulait à toute une série de pans de l'activité professionnelle, par exemple pour expliquer le désordre scolaire, pour expliquer les difficultés scolaires des élèves, pour expliquer les conflictualités enfantines, pour expliquer la relation des parents avec l'école… et qu'il y avait une sorte de corrélation entre racialisation des publics et difficultés professionnelles des enseignantes et des enseignants.
Et ce que j'ai pu constater en explorant ce sujet c'est que cette saillance de la norme raciale était d'autant plus forte que la difficulté professionnelle des enseignants et des enseignantes était importante. En fait, cette thématique raciale est mobilisée pour externaliser la difficulté professionnelle.
Question : Pourquoi avoir choisi ce sujet ?
J'ai choisi ce sujet parce que j'étais moi-même enseignante, professeur des écoles en zone d’éducation prioritaire renforcée et j'avais besoin de réponses. Des réponses que je ne trouvais pas. Et la seule solution qui m'est venue a été de produire moi-même les réponses.
Quelles sont vos principales conclusions ?
J'ai fait une enquête qualitative et pour partie ethnographique sur un petit territoire. Je crois que malheureusement on ne peut pas se passer de statistiques dites ethniques. Cela permettrait de mettre en évidence les blocages, de mettre en évidence que certaines personnes, les personnes qui appartiennent au groupes minoritaires sont mécaniquement exclues des grandes écoles, des facultés, des universités les plus prestigieuses etc. Et donc, dans la foulée ça permettrait potentiellement aussi de mettre en place des actions positives, ce qu'on appelle la discrimination positive. Mais ce n’est pas de la discrimination en fait, c'est renverser l'injustice. C'est des actions positives pour permettre aux personnes qui étaient écartées de ces espaces d'y avoir enfin accès.
Ce que je vois dans mes résultats, ce n’est pas tant de l’espoir immédiat mais de l'espoir « si », de l'espoir « si on met en œuvre certaines démarches, certains processus » pour ce que j'appelle déracialiser l'école. Et ça je pense que ça passe fondamentalement par de la pédagogie. Déjà de la pédagogie faite aux enseignants et enseignantes et futur enseignants et enseignantes.
Qu’espérez-vous avec ce travail ?
Ce que j'espère avec ce prix c'est que ce prix constitue en fait une reconnaissance institutionnelle, non pas de mon travail mais de la réalité de la manière dont sont produites des inégalités dans et par l'espace scolaire et cette reconnaissance pour moi est une porte ouverte vers une lutte contre les injustices et les discriminations dont sont victimes les élèves.

Prix de thèse 2023

En 2023 le jury du prix de thèse était composé de :

  • Pierre-Yves Baudot, Professeur, Université Paris-Dauphine/PSL
  • Philippe Bonfils, professeur, Université Aix-Marseille, Directeur de l’Institut des sciences pénales et de criminologie
  • Vincent-Arnaud Chappe,  chargé de recherche CNRS, Centre d'étude des mouvements sociaux (CEMS-EHESS)
  • Lucie Cluzel-Metayer, Professeur, Université Paris Nanterre
  • Mathilde Darley, Chargée de recherche CNRS, Directrice-adjointe du CESDIP
  • Thierry Delpeuch, chercheur CNRS, UMR Pacte de Grenoble
  • Pascale Deumier, professeur, Université Lyon III Jean Moulin 
  • Danièle Lochak, professeure émérite, Université Paris-Nanterre 
  • Elise Palomares, Professeure Université de Rouen, laboratoire Dysolab, affiliée à l’I.C Migrations 
  • Alexis Spire, Directeur de recherche CNRS, EHESS

Les thèses primées en 2023

« Handicap et destinées sociales : une enquête par méthodes mixtes » de Célia Bouchet

Réalisée sous la direction d’Anne Revillard (Associate Professor, Sciences Po) et de Philippe Coulangeon (Directeur de recherche CNRS, Sciences Po, OSC) cette thèse examine les différenciations sociales entre la population valide et plusieurs sous-populations ayant grandi avec un handicap, dans différents domaines (scolarité, emploi, vie familiale).

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Il y a beaucoup d'accent aussi bien dans les études scientifiques que dans les politiques sur l'accès par exemple aux établissements scolaires ordinaires des enfants handicapés, l'accès à l'emploi, etc.
Il est très peu question du niveau de diplôme des personnes handicapées. Il est très peu question du type de profession qu'elles exercent, du salaire qu'elles reçoivent etc.
Je m'intéresse en fait aux positions qu'occupent dans la société les personnes ayant grandi avec un handicap. J'ai utilisé deux types de méthodes. Des méthodes statistiques, fondées sur une enquête de l'INC, l'enquête Emploi. En parallèle j'ai réalisé des entretiens biographiques en ciblant deux groupes de personnes handicapées : les personnes ayant grandi avec une déficience visuelle partielle ou totale et les personnes ayant grandi avec des troubles spécifiques des apprentissages. On peut appeler les troubles dys.
Quelle que soit la sphère de la vie, quels que soient les indicateurs que je trouvais, je trouvais des inégalités. Par contre, je voyais bien aussi que l'ampleur de ces inégalités n’était pas forcément la même selon tous les groupe. Dans le cas de personnes qui grandissent avec des limitations cognitives, l'accès aux études supérieures est très très freiné et ça fait par boule de neige plein d'effets sur le parcours alors que par exemple pour les personnes qui ont une déficience visuelle il y a des inégalités assez modestes en terme de niveau d'étude mais par contre au moment de l'accès à l'emploi, là, ça coince vraiment.
Je me suis rendu compte aussi que les mécanismes qui produisait ces inégalités n’étaient pas forcément complètement les mêmes pour tout le monde. Dans le discours public il y a beaucoup l'accent sur « il faut changer le regard sur le handicap », « il faut déconstruire les stéréotypes » etc. Et c'est un vrai mécanisme. J'ai en entretien des personnes qui me rapportent ne pas avoir eu de réponse à leur CV où leur handicap était indiqué etc. Mais j'ai aussi énormément de cas où des personnes m'expliquent les désavantages concrets auxquels elles se trouvent confrontées dans des cas où en fait elles n'ont pas d'aménagement. Leurs restrictions ne sont pas compensées et ça c'est des formats plus indirects, qui sont beaucoup moins visibles, qui impliquent en fait des mesures matérielles très concrètes.
Alors c'est l'exercice qui est toujours un petit peu délicat en sociologie parce que on arrive avec une perspective de neutralité. On doit pas dire ce qui est bien ou ce qui est mal, ce qu'il faut faire ou ce qu'il ne faut pas faire. Ce que je disais aux personnes que je rencontrais c'est que au moins ça m'importait de rendre les grands enjeux clairs pour les personnes qui seraient en mesure de prendre ces décisions de leur prémacher le travail en quelque sorte pour leur dire qu’il y a des leviers à tel et tel endroit auxquels il faudrait réfléchir collectivement parce qu’à ce stade c'est pas assez le cas.
J'espère que ma thèse pourra contribuer à faire ça.

« Minorités sexuelles et de genre en exil. L'expérience minoritaire à l'épreuve de la migration et de la demande d'asile en France » de Florent Chossière

Réalisée sous la direction de Marianne Blidon (Maîtresse de Conférences, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) et Serge Weber (Professeur, Université Gustave Eiffel), cette thèse porte sur les expériences migratoires de personnes LGBT+, qui, après avoir fui leur pays, ont demandé l’asile en France au motif de persécutions et craintes de persécutions liées à l’orientation sexuelle ou à l’identité de genre minoritaires.

Ma thèse porte sur les expériences migratoires de personnes qui ont quitté leur pays en raison de persécutions subies à cause de leur orientation sexuelle ou leur identité de genre minoritaire et qui ont demandé l'asile sur ce motif là en France. L'idée c'était de comprendre les expériences spécifiques de ce groupe, leur expérience de la migration. Comment au quotidien on peut vivre en temps à la fois que minorités sexuelles et de genre et réfugié.
Les institutions de l'asile ne fournissent pas de statistiques sur le motif de la demande d'asile, donc c'est plutôt à partir de ce que j'ai vu sur mon terrain, au sein d'une association spécialisée. La première nationalité, accompagnée par l'association dans laquelle j'ai fait mon terrain, c'étaient les ressortissants du Sénégal, Maghreb, Moyen-Orient, Asie du Sud, Inde, Bangladesh, Pakistan, également Europe de l'Est, Russie, Ukraine, avant le conflit ukrainien.
Je pensais que la plus grande difficulté en faisant cette enquête là, ce serait d'entendre les récits de persécution des personnes dans certains pays. Mais en fait, ce qui était très difficile à gérer aussi, c'était la précarité à laquelle ils sont confrontés. En France beaucoup dorment à la rue par exemple certains ne réussissent pas à avoir le statut de réfugié puisqu’on rejette leur demande d'asile. Toute l'angoisse également qu'il y a à vivre dans une incertitude de qu'est-ce qui va m'arriver si ma demande d'asile est refusée… L'impossibilité de se projeter dans le temps, ce qui fait que certaines personnes finalement se demandent si elles ont bien fait de partir. Et quand on sait les réalités, qu'elles ont fui de leur pays. Qu'elles en arrivent à se poser ce type de question, ça montre à quel point l'accueil en France est compliqué.
On est dans un contexte où les institutions de l'asile ont quand même un soupçon marqué à l'égard des récits des demandeurs d'asile les conditions dans lesquelles les demandes d'asile sont étudiées sont de plus en plus compliquées. Par exemple, la réforme actuelle du projet sur l'immigration qui est en cours qui tend à réduire par exemple les formations collégiales à la Cour nationale du droit d'asile où dans certains cas pourront être étudiées par une seule personne alors que ce sont des cas très complexes. Ou alors le fait qu'on veut réduire les temps des procédures et c'est d'accélérer le processus de prise de décision alors même que le cadre est tellement normé que les gens ont besoin de beaucoup de temps pour se préparer en particulier pour ce sujet où il faut réussir à parler de choses très intimes.
Le fait qu'en fait un demandeur d'asile sur deux n'est pas logé par exemple par le dispositif d'accueil nationaux ça répond aussi au problèmes spécifiques que rencontrent les demandeurs d'asile lgbt+. Ils ne peuvent pas toujours compter sur les diasporas en France pour être hébergés du fait de leur orientation sexuelle ou identité de genre minoritaire. Mais dans un contexte où tous les demandeurs d'asile seraient logés et auraient une autonomie résidentielle et matérielle, cette question de l'homophobie ou des LGBT-phobies de façon générale ne se poserait pas, puisqu’il pourrait y avoir une autonomie. Et donc, il faut aussi qu'il y ait des conditions générales d'accueil qui permettent de régler les difficultés auxquelles tout le monde est confronté de façon générale.
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Défenseur des droits – République française – 09 69 39 00 00 * Prix d’un appel local

Prix de thèse 2022

Sur proposition unanime du jury, le prix de thèse 2022 a récompensé Léopold VANBELLINGEN pour sa thèse de droit intitulée « La neutralité de l'entreprise privée : contribution à l'étude du droit européen de la liberté de religion et de la non-discrimination des travailleurs face à un transfert conceptuel plurivoque », soutenue le 26 mai 2021, à l’Université catholique de Louvain.

Le jury du prix de thèse de l’édition 2022 était composé de :

  • François BONNET, Chargé de recherche au CNRS, UMR Pacte
  • Séverine CHAUVEL, Maîtresse de conférences en sociologie, Université Paris-Est-Créteil, LIRTES, UFR SESS-STAPS
  • Lucie CLUZEL-METAYER, Professeur de droit public, Université Paris Nanterre
  • Mathilde DARLEY, Chargée de recherche CNRS, Directrice-adjointe du CESDIP
  • Vincent DUBOIS, Professeur de Sociologie et Science politique, Université de Strasbourg, IEP, SAGE
  • Marie MERCAT BRUNS, Professeure de droit privé, École de droit de Sciences Po, CNAM, CNRS
  • Sophie ROBIN-OLIVIER, Professeure de droit privé et sciences criminelles, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
  • Daniel SABBAGH, Directeur de recherche, Sciences Po Paris, CERI
  • Mirna SAFI, Sociologue, Sciences Po, Observatoire sociologique du changement (OSC), CREST-LSQ, LIEPP
  • Mathieu TRACHMAN, Chargé de recherche INED, Chercheur associé IRIS/EHESS
Prix de Thèse 2022 du Défenseur des droits
La neutralité des entreprises face aux expressions religieuses des travailleurs
Léopold Vanbellingen, chercheur à la Chaire de droit des religions de l’UC-Louvain
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Qu’est-ce que le concept de neutralité dans l’entreprise ?
Ce qu'on observe maintenant depuis plus de 20 ans en France, en Belgique, c'est ce recours au concept de neutralité par les employeurs privés pour finalement restreindre de manière générale et anticipative toute demande d'expression religieuse sur le lieu de travail. Quand on parle d'expression religieuse en entreprise, on peut penser évidemment à la question des horaires de travail, des jours de congés qui vont tenir compte de la religion. Il y a aussi la question éventuellement de la prière ou des régimes alimentaires, évidemment les signes religieux qui sans doute font le plus parler d'eux en particulier le foulard islamique. Et donc, cette neutralité qui est invoqué de plus en plus par certains employeurs privés, et bien, elle vient vraiment apporter une réponse anticipative pour dire aux travailleurs : « Finalement chez nous pas de religion dans l'entreprise puisque je considère que ça n'a pas sa place ».
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Pourquoi de plus en plus d’entreprises choisissent d’appliquer ce concept de neutralité ?
Je pense qu'il y a un sentiment d'insécurité juridique, un sentiment parfois d'être démuni que ce soit de la part des employeurs ou même des managers de terrain, qui face à la récurrence ou à la diversité des demandes d'expression religieuse, et bien, ne savent pas exactement ce qu'ils peuvent se permettre, ce qu’ils doivent pouvoir octroyer, on va dire à leurs travailleurs et donc, par facilité, ou plutôt pour des questions d'image, vont se dire : « j’ai cet outil de neutralité qui me permet de finalement d'anticiper toutes ces demandes et d'avoir une réponse qui est plus globale plus systématique ».
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Quelles sont les limites de ce concept de neutralité ?
Aussi, se pose la question finalement de savoir qu'est-ce que la neutralité ? Quelles convictions sont visées par la neutralité ? Est-ce qu'il s'agit uniquement des convictions religieuses ou bien est-ce qu’il faut aussi prendre en compte les convictions politiques, voire même n'importe quelle conviction ? Et alors on bascule aussi vers une autre question qui est de savoir comment définir une expression religieuse d'une expression politique par exemple. L'enjeu évidemment, du point de vue juridique, c'est de vérifier que cette neutralité est invoquée de manière sincère et cohérente par l'entreprise et donc ça implique de voir si derrière cette invocation d'une neutralité, il n'y a pas en fait une focalisation sur une religion en particulier ou même une expression un signe religieux spécifique.
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Quelle a été votre méthode de travail lors de vos recherches ?
J'ai vraiment été fouiller dans l'ensemble des décisions de justice, au niveau européen, au niveau national, donc en particulier en Belgique et en France, mais j'ai aussi été voir du côté des décisions, des dossiers qui finalement ont été traités par les autorités publiques indépendantes donc le Défenseur des droits en France et puis Unia en Belgique qui, évidemment, régulièrement, reçoivent des signalements en matière de discrimination au travail, y compris sur la question de la neutralité religieuse de l'entreprise.
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Quelles sont les conclusions de votre thèse ?
Ce que ma thèse montre c'est que pour savoir si cette neutralité invoquée par l'employeur est compatible avec les droits fondamentaux des travailleurs du point de vue de la religion, et bien il faut vraiment les voir quels sont les objectifs sous-jacents poursuivis par l'entreprise. Donc par exemple, si on est dans une question d'image de marque et bien la réponse du droit va être différente que si on est dans le cas d'une neutralité qui a invoqué pour assurer une paix sociale au sein d'entreprise. Une autre hypothèse c'est lorsque la neutralité est invoquée de manière vraiment idéologique par l'employeur qui finalement ne souhaite pas que la moindre expression religieuse soit permise sur son lieu de travail. Dans cette hypothèse-là évidemment on devra s'attacher à vérifier vraiment la sincérité de l'employeur et en particulier vérifier que derrière cette idée de neutralité il vise pas en réalité une religion en particulier ou une expression religieuse en particulier.
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Qui peut se saisir de vos résultats et à quelles fins ?
Je pense que la thèse va être utile au Défenseur de droits mais même plus largement aux personnes qui sont confrontées à la gestion des fait religieux dans l'entreprise, que ce soit les responsables RH, les managers de terrain, les avocats, les magistrats etc., parce qu’elle permet finalement face à une invocation d'un neutralité dans l'entreprise et à une demande religieuse en particulier, elle permet vraiment, d'avoir des balises concrètes, opérationnelles, qui permettent de savoir si oui ou non, l'employeur a adopté une position qui du point de vue du des droits fondamentaux du travailleur est acceptable ou non.
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Défenseur des droits – République française – 09 69 39 00 00 * Prix d’un appel local

Prix de thèse 2021

Sur proposition unanime du jury, le prix de thèse 2021 a récompensé Elsa Favier pour sa thèse de sociologie intitulée « Enarques et femmes. Le genre dans la haute fonction publique », soutenue le 30 novembre 2020 à l’EHESS.

Le jury 2021 était composé de :

  • François BONNET, Chargé de recherche au CNRS, UMR Pacte
  • Séverine CHAUVEL, Maîtresse de conférences en sociologie, Université Paris-Est-Créteil, LIRTES, UFR SESS-STAPS
  • Mathilde DARLEY, Chargée de recherche CNRS, Directrice-adjointe du CESDIP
  • Fabrice DHUME, Sociologue, membre du collectif CRIsIS, chercheur associé à l'URMIS
  • Vincent DUBOIS, Professeur des Universités en Sociologie et Science politique, Université de Strasbourg, IEP, SAGE
  • Marie MERCAT BRUNS, Professeure de droit privé à l'École de droit de Sciences Po, CNAM, CNRS.
  • Sophie ROBIN-OLIVIER, Professeure de droit privé et sciences criminelles, Centre d'Etudes Juridiques Européennes et Comparées à l'Université Paris Ouest - Nanterre la Défense
  • Daniel SABBAGH, Directeur de recherche, Sciences Po Paris, CERI
  • Mirna SAFI, Sociologue, Sciences Po, Observatoire sociologique du changement (OSC), CREST-LSQ, LIEPP
  • Mathieu TRACHMAN, Chargé de recherche INED, Chercheur associé IRIS/EHESS
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Énarques et femmes : le genre dans la haute fonction publique
L’ENA (Ecole nationale de l’administration) c'est une grande école qui a été créé en 1945 et qui était destinée à former les élites administratives de la nouvelle République. Aujourd'hui ça constitue la voie royale pour accéder à la haute fonction publique en France.
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Quelle place pour les femmes à l’ENA ?
L’ENA a en fait une particularité, c'est qu'elle a été ouverte aux femmes dès 1945. En s’intéressant à ces femmes qui ont fréquenté cette grande école, l'idée c'était d'analyser un bouleversement qui est un bouleversement majeur des dernières décennies, à savoir la féminisation des élites administratives. Entre 2001 et 2019 la part des femmes dans la haute fonction publique est passée de 12 à 41% donc on est quand même sur une évolution importante.
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Quel est le profil des femmes qui intègrent l’ENA ?
Il y a des concours qui permettent d'accéder à l'ENA à l'issue des études supérieures et donc là on est sur des profils très élitistes. Et ça c'est le cas à la fois des filles et des garçons. Et il y a une autre possibilité pour entrer à l'ENA, qui est de passer des concours en cours de carrière, après plusieurs années d'expérience professionnelle. Et ces concours-là sont réputés être des voix d'ascension de classe. Et en réalité, c'est le cas pour les hommes puisque la moitié des hommes qui entrent à l'ENA par ces concours-là, en cours de carrière donc, viennent des classes moyennes et populaires. Mais c'est beaucoup moins le cas pour les femmes puisque seulement un tiers des femmes qui entrent à l'ENA en cours de carrière viennent des classes moyennes et populaires. Ce qui veut dire que l'ascension de classe est en fait un privilège masculin
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Les femmes énarques réussissent-elles cette scolarité aussi bien que les hommes ?
Jusqu'au milieu des années 90 les femmes sont beaucoup moins bien classées à l'issue de la scolarité à l'ENA. Quand vous sortez de l'ENA vous pouvez accéder aux « rands corps » qui sont les corps les plus prestigieux de la fonction publique et donnent accès aux carrières les plus rémunératrices et les plus prestigieuses. Et pour ces générations-là, quand vous êtes un homme vous avez deux fois plus de chances de sortir dans les grands corps que quand vous êtes une femme. Les inégalités entre les sexes dans la réussite à la sortie de l'ENA s'estompent à partir du milieu des années 90. Aujourd'hui, les femmes réussissent aussi bien que les hommes à la sortie de l'ENA.
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Les femmes énarques s’orientent-elles vers les mêmes carrières que les hommes ?
Une fois que vous avez votre classement, vous choisissez des postes dans la haute fonction publique. Et là on voit que les femmes et les hommes ne font pas les mêmes choix. Les femmes sont beaucoup plus souvent vers les ministères sociaux, en charge des sujets sociaux et qui ouvrent vers des carrières moins rémunératrices et moins prestigieuses. Dans la haute fonction publique on a une organisation du travail où ce qui est valorisé c'est des formes de présence au bureau 15 heures par jour, un très fort investissement temporel… Et ça, cette organisation du travail, favorise de fait les hommes qui ont des conjointes à qui ils peuvent déléguer le travail domestique, le travail parental.
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Comment se comportent les femmes qui réussissent dans la haute fonction publique ?
Ces femmes-là sont obligées de se conformer à tout un tas de normes qui sont des normes masculines : essayer d'éviter par exemple des manifestations d'émotion qui sont associées au féminin, donc ne pas manifester trop de compassion. Et c'est donc à tout un travail qu'elles fournissent pour s'ajuster à l'idéal viril de la profession qu'elles exercent et en même temps on voit bien qu'une des attentes de la part des personnes avec qui elles travaillent c'est qu'elles restent des femmes et qu'elles manifestent une forme de féminité.
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Y’a-t-il un plafond de verre au sommet de l’État ?
Aujourd'hui il y a de nombreuses femmes qui ont réussi à percer le plafond de verre au sein de l'État. En revanche il reste un plafond de verre puisqu’il y a moins de femmes au sommet de la hiérarchie que plus bas.
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Les politiques mises en œuvre pour plus d’égalité dans la haute administration sont-elles efficaces ?
Depuis 2012 il y a une loi qui impose aux administrations des quotas par sexe pour les nominations aux plus hauts postes. Ça n’est pas parce que vous avez une parité numérique, que vous avez 50 % de femmes, que vous avez l'égalité. De fait, les femmes subissent une charge mentale liée à la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle qui est beaucoup plus importante que les hommes. Elles bénéficient moins souvent du soutien d'un conjoint. Ça n’est pas parce qu'il y a 50% de femmes qu'elles ne vont pas subir des formes de harcèlement sexistes ou que ça ne va pas être difficile justement d'être reconnues comme légitime à occuper ces rôles professionnels qui ont été construits comme masculins. Et une autre chose par rapport à ces politiques de quotas, c'est de se demander à qui elles bénéficient. De fait, ce qui a été montré, c'est que ces politiques de quotas quand elles sont comme dans l'administration, elles touchent seulement les niveaux des plus hauts de la hiérarchie. De fait, elles bénéficient à des femmes de l'élite qui sont déjà très dotées socialement.
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L’égalité au sein de l’élite administrative, c’est pour bientôt ?
Les progrès vers l'égalité de genre ça ne suit pas une logique linéaire ou inéluctable donc il faut rester attentif.
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Défenseur des droits – République française – 09 69 39 00 00 * Prix d’un appel local

Prix de thèse 2020

Sur proposition unanime du jury, le prix de thèse 2020 a récompensé Clara Deville pour sa thèse de sociologie, « Les chemins du droit. Dématérialisation du RSA et distance à l’Etat des classes populaires rurales ».

Le jury 2020 était composé de :

  • Magali BESSONE, Professeure de philosophie politique à l'Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, Institut des Sciences Juridique et Philosophique de la Sorbonne, membre associée du CIRESC, EHESS.
  • François BONNET, Chargé de recherche au CNRS, rattaché au centre de recherche Pacte (Grenoble).
  • Mathilde DARLEY, Chargée de recherche CNRS, Directrice-adjointe du CESDIP
  • Vincent DUBOIS, Professeur des Universités en Sociologie et Science politique, Université de Strasbourg
  • Jean-Charles FROMENT, Professeur des Universités en Droit public, Sciences Po Grenoble
  • Marie MERCAT BRUNS, Professeur de droit privé à l'École de droit de Sciences Po et au CNAM, membre du laboratoire Lise CNRS – Présidente du jury
  • Pap NDIAYE, Professeur des Universités en Histoire, Sciences Po Paris, Centre d'Histoire de Sciences Po
  • Mirna SAFI, Sociologue, chercheure à Sciences Po, Observatoire sociologique du changement (OSC), membre du laboratoire CREST-LSQ et affiliée au LIEPP
  • Mathieu TRACHMAN, Chargé de recherche INED, Chercheur associé IRIS / EHESS
  • Marie-Anne VALFORT, Enseignante-chercheuse à l’École d’Économie de Paris et à l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, en détachement à l’OCDE depuis 2016
Prix de Thèse 2020 du Défenseur des droits
Les chemins du droit : Dématérialisation du RSA et distance à l’État des classes populaires rurales
Clara Deville, docteure en sociologie à l’Université de Picardie Jules Verne
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Pourquoi vous êtes-vous intéressée au sujet de la « dématérialisation du RSA et des inégalités d’accès aux droits » ?
Je me suis intéressé à mon sujet de thèse, aux processus, aux réformes de dématérialisation des droits sociaux et aux inégalités d'accès, suite à une expérience professionnelle puisque j'étais assistante sociale, ce qui m'a permis de mesurer les écarts entre le droit et son application, de voir au concrètement les difficultés des personnes à demander leurs droits, notamment des habitants de milieu rural. Donc c'est partant de ces questionnements-là que j'ai entamé des réflexions à l'université de Bordeaux sur ce sujet. J'ai commencé ce travail à l'aide de l'obtention d'une bourse de recherche de la CNAF, la caisse nationale des allocations familiales. Donc en fait je suis passé du statut de travail en social au statut d'enquêtrice sur le même territoire d'étude, en milieu rural, en libournais. J'ai commencé à réaliser un terrain d’enquête à ce moment-là.
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Quels sont les principaux résultats de votre recherche doctorale ?
Je pourrais citer trois principaux résultats à ma recherche. Le premier concerne les inégalités d'accès au RSA. J'ai pu constater que ceux qui parviennent le plus facilement à avoir leurs droits sont ceux qui disposent le plus de capitaux culturels, qui ont pu aussi engranger des expériences positives et heureuse avec l'État, que ce soit avec l'école avec les impôts…, qui ont pu aussi prendre conscience de leur contribution, voir matériellement ou prendre conscience matériellement des impôts qu'ils ont versé, de leur contribution à un financement de l'État et qui vont donc percevoir comme légitime le fait d'avoir une rétribution, d'avoir une compensation aux efforts qu'ils ont fournis.
Le deuxième résultat concerne les réformes de dématérialisation des procédures d'accès au droit. Mes travaux de recherche ont pu montrer que ces réformes avaient moins pour objectif de faciliter l'accès aux droits des populations démunies que de préserver les ressources des institutions du social. En dématérialisant l'accès au droit, on préserve les budgets, les ressources humaines et la réputation, les réputations des institutions du social. Pour ceux qui sont les plus précaires, les outils numériques accroissent la distance à l'État. Maintenant, pour obtenir un rendez-vous à la CAF il faut passer par le numérique. Il y a toute la digitalisation des administrations pour la réalisation de certaines démarches comme les déclarations trimestrielles, les tests d'éligibilité… Tout ça fait que toutes ces démarches préalables qui sont transférées vers les administrés vont créer des barrières entre les personnes et leurs droits, barrière qui sont d'autant plus compliquées à franchir que vous descendez dans la hiérarchie interne des classes populaires rurales.
Le troisième résultat que je voudrais évoquer : le droit, et notamment le droit social, les aides sociales, sont un facteur d'aggravation, d'amplification des inégalités internes aux classes populaires rurales. Ceux qui ont le plus de capitaux accèdent plus rapidement aux droits et à l’inverse, les plus défavorisés, les classes les moins stabilisées, sont celles qui vont accéder le plus difficilement à leurs droits.
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Quelles recommandations votre travail permet-il d’adresser aux acteurs politiques et juridiques ?
Les pistes de réflexion ouvertes par ma thèse, sur l'amélioration de l'accès au droit, c'est d'abord la dimension spatiale de l'accès au droit, c'est à dire les implantations géographiques des lieux d'accès au droit. Il y a une tendance au retrait de l'État des espaces ruraux. Or, la dimension spatiale est essentielle. Il faut prendre en considération que l'espace il est vécu différemment en fonction des trajectoires sociales et donc que la présence de l'état en milieu rural a son importance dans l'accès aux droits. En milieu rural, le déplacement vers une ville moyenne ou vers une petite ville, peut être complexe et peut être porteur de coûts d'accès qui entravent l'accès au droit.
La deuxième piste de réflexion ouverte par ma thèse concerne l'accueil, l'accueil dans les bâtiments administratifs. Les réformes de dématérialisation ont technicisé, complexifié, l'organisation des bâtiments en mettant des bornes d’espace libre-service, des ordinateurs, dans les bâtiments. Penser l'accueil c'est penser comment on accueille les personnes, comment on les accompagnent dans l'accès au droit et comment on facilite la lecture des bâtiments, leur utilisation, leur appropriation par des gens qui n'ont pas forcément l'habitude.
La troisième piste de réflexion concerne l'accompagnement humain dans l'accès aux droits. Permettre à des travailleurs sociaux ou à des agents administratifs d'accompagner les différentes démarches administratives, d'accompagner à leur réalisation, pas seulement sur un plan technique mais aussi sur un plan social et humain en prenant en compte la diversité des trajectoires, la diversité des compétences, des demandeurs de droits.
Défenseur des droits – République française – 09 69 39 00 00 * Prix d’un appel local

Prix de thèse 2019

Sur proposition unanime du jury, le prix 2019 a été décerné à deux lauréats ex-aequo pour leurs travaux de doctorat portant sur : 

  • « L’accès – ou le non accès – à la protection des mineur.e.s isolé.e.s en situation de migration », thèse de sociologie soutenue par Noémie Paté ;
  • « Sans domicile fixe et droit », thèse de droit public soutenue par Anne-Sophie Ranaivo.

En 2019, le jury était composé de :

  • Madame Véronique CHAMPEIL DESPLATS, Professeur des Universités ;
  • Madame Mathilde DARLEY, Chargée de recherche CNRS ;
  • Monsieur Vincent DUBOIS, Professeur des Universités ;
  • Madame Mireille EBERHARD, Maîtresse de conférences ;
  • Monsieur Jean-Charles FROMENT, Professeur des Universités ;
  • Madame Marie MERCAT BRUNS, Professeur des Universités – Présidente du Jury ;
  • Madame Dominique MEURS, Professeure des Universités ;
  • Monsieur Pap NDIAYE, Professeur des Universités ;
  • Monsieur Daniel SABBAGH, Directeur de recherche, Sciences Po ;
  • Madame Mirna SAFI, Directrice de recherche ;
  • Madame Evelyne SERVERIN, Directrice de recherche CNRS.
Prix de Thèse 2019 du Défenseur des droits
« Sans domicile fixe et droit »
Anne-Sophie Rainavo, docteure en droit public de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
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Pourquoi avez-vous choisi ce sujet de thèse ?
Les personnes sans domicile fixe ont fait l'objet de plusieurs études auprès notamment des chercheurs en sciences politiques, en sociologie et d'anthropologie mais jamais d’étude transversale en droit. Et donc j'ai voulu combler ce manque, pallier ce manque, en proposant une étude transversale en droit public et privé sur les sans domicile fixe. L'autre intérêt personnel mais aussi scientifique c'était de me dire que ce qui se passe aux franges d'un ordre juridique aux franges d'une société, ce qui est le cas des personnes sans domicile fixe, est un révélateur sur la coloration politique d'un ordre juridique. Regardez ce qui se passe pour elles, juridiquement, permet de voir si véritablement les grands principes qui sont censés sous-tendre notre démocratie et notre ordre juridique sont véritablement respectés.
Quels sont les principaux résultats de votre recherche doctorale ?
J'ai voulu démontrer, c'est ma thèse, que le droit positif reconduit une ambivalence historiques à l'égard des personnes sans domicile fixe. D'un côté il les protège mais de l'autre il les maintient. Pourquoi ? Parce qu'on a beau reconnaître beaucoup de droits, il y a beaucoup de freins à la mise en application de ces droits. Parce que on a beau avoir mis en place une politique de lutte contre le sans-abrisme, cette politique est tellement exigeante pour les sans-abri que les personnes sans abri ne s'en saisissent pas ou en tout cas ne peuvent pas véritablement entrer dans un processus de sortie.
Et puis on a encore un droit pénal, en tout cas un droit répressif, qui est encore le support d'une véritable répression des personnes sans domicile fixe. Et le résultat c'est que le droit positif n'est pas véritablement une ressource pour pouvoir s'émanciper de la situation de sans abri.
Quelles recommandations votre travail permet-il d’adresser aux acteurs politiques et juridiques ?
Premièrement, simplifier, rationaliser, réorganiser. Le droit extrêmement confus, extrêmement fouillé. Il y a des stratifications successives de normes juridiques qui rendent l'ensemble incompréhensible. Donc le premier travail c'est celui de la clarification, à mon sens. Et ça c'est un travail juridique mais aussi politique.
La seconde recommandation, si l’on veut véritablement protéger les personnes sans abri, il faut diminuer le niveau d'exigence à leur égard et il faut véritablement proposer une aide qui soit inconditionnelle. Le logement d'abord, avant toute chose. Une personne sans abri a besoin d'un logement. Pas, avant, de trouver un travail. Pas, avant, de suivre une thérapie. Non. Elle a d'abord besoin d'un logement et on lui propose une aide pluridisciplinaire mais c'est une proposition et ça n’est pas la condition pour pouvoir bénéficier d'aides sociales ultérieures.
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Défenseur des droits – République française – 09 69 39 00 00 * Prix d’un appel local

Le prix de thèse 2018

Sur proposition unanime du jury, le prix 2018 a été décerné à deux lauréats ex-aequo pour leurs travaux de doctorat portant sur :

  • « Transfuges de sexe. Genre, santé et sexualité dans les parcours d’hommes et de femmes trans’ en France », thèse de sociologie soutenue par Emmanuel Beaubatie ;

  • « Les peines préventives, étude comparée de leurs dynamiques en France, en Angleterre et au Pays de Galles », thèse de droit pénal soutenue par Sabrina Delattre.


Le prix de thèse 2017

Sur proposition unanime du jury, le prix 2017 a été décerné à deux lauréats ex-aequo pour leurs travaux de  doctorat portant sur  :

  • « Genre et rapports de pouvoir dans l'institution judiciaire. Enquête sur le traitement institutionnel des déviances adolescentes par la justice pénale et civile dans la France contemporaine », thèse de sociologie soutenue par Arthur Vuattoux
  • « L’opposabilité des droits et libertés », thèse de droit public soutenue par Cédric Roulhac

Le prix de thèse 2016

Le prix de thèse 2016 a récompensé la thèse de Lola Isidro, "L'étranger et la protection sociale", conduite sous la direction du Professeur Cyril Wolmark de l'Université Paris-Ouest-Nanterre-la-Défense.


Le prix de thèse 2015

Le 8 décembre 2015, pour sa première édition, le Prix de thèse organisé par le Défenseur des droits a récompensé la thèse de Grégory Giraudo-Baujeu intitulée  « Travail et racisme. Carrières d’intérimaires d’origine magrébine et africaine et épreuves de la discrimination ».