Atteintes aux droits des personnes détenues : la Défenseure des droits interpelle les pouvoirs publics et réclame des mesures urgentes
07 novembre 2024
- Détention
- Droits fondamentaux
A l’occasion de la publication d’un recueil de fiches pratiques à l’attention des personnes détenues, la Défenseure des droits interpelle les pouvoirs publics sur les atteintes aux droits graves et répétées que subissent les personnes incarcérées, et notamment les plus vulnérables, dans les établissements pénitentiaires.
Renforcer la connaissance de leurs droits par les personnes détenues
Le Défenseur des droits, qui veille au respect et à la promotion des droits des personnes détenues, est de plus en plus saisi par ces dernières : difficultés rencontrées pour le transfert vers une prison plus proche du lieu où vit sa famille, refus de soins, barrières matérielles persistantes pour le renouvellement d’une pièce d’identité, recours abusif à une fouille intégrale…
Au regard des réclamations que traite l’institution et des ruptures de droits constatées et pour aider les personnes détenues à mieux connaître leurs droits et à les faire respecter, la Défenseure des droits rend public un recueil intitulé « Faire respecter mes droits en prison ».
Liens familiaux, santé, travail, sanctions disciplinaires, relations avec la justice… le recueil explique, dans un langage clair et accessible, ce que dit le droit et comment le Défenseur des droits peut intervenir. Les situations particulières des personnes détenues les plus vulnérables font également l’objet de fiches dédiées : les problèmes liés à la pauvreté, les difficultés des personnes étrangères, les conditions de détention pour les personnes en situation de handicap ou âgées, les femmes et les mères, la scolarité et les activités des mineurs.
Ce guide, qui sera remis à l’ensemble des établissements pénitentiaires de France et mis à disposition des détenus dans les bibliothèques, s’inscrit dans la continuité des travaux menés par le Défenseur des droits. Pour l’année 2023, l’institution comptabilise 7 878 dossiers traités par les 150 délégués présents dans les établissements pénitentiaires, 8 124 appels reçus sur le numéro gratuit géré par le Défenseur des droits (le 3141), et 1 026 réclamations traitées par ses juristes.
Plusieurs recommandations pour répondre à l’urgence de la situation
La Défenseure des droits, grâce à la connaissance fine de la situation carcérale au regard des réclamations que traite l’institution et des ruptures de droits constatées, appelle à des réponses d’ampleur pour mettre fin à la violation des droits des personnes détenues.
Au premier octobre dernier, le nombre de personnes détenues s’élevait à 79 631. Avec une densité carcérale moyenne de 127,3%, qui dépasse parfois les 150%, voire les 200% dans certains établissements pénitentiaires, la surpopulation entraîne une atteinte à la dignité des personnes détenues, soumises à des conditions matérielles de détention inhumaines et dégradantes. Elle conduit également à une défaillance de tous les services publics auxquels doivent pouvoir accéder les détenus : santé, éducation, formation, travail, justice. Les personnes détenues, et notamment les plus vulnérables, subissent ainsi des atteintes quotidiennes dans l’accès et l’effectivité de leurs droits.
Les mesures réclamées par l’institution doivent répondre à trois exigences majeures : respecter la dignité des personnes détenues, garantir leur accès aux services publics et s’adapter aux besoins des personnes détenues particulièrement vulnérables. Dans une communication à l’attention des pouvoirs publics, la Défenseure des droits appelle notamment aux actions suivantes :
- Améliorer le recours aux peines alternatives à l’emprisonnement, particulièrement le travail d’intérêt général et les aménagements de peine et mettre en place un mécanisme national contraignant de régulation carcérale ;
- Mettre en place un mécanisme de contrôle interne de la déontologie des agents pénitentiaires, complémentaire au contrôle externe déjà exercé par le Défenseur des droits ;
- Respecter les principes de subsidiarité et de proportionnalité dans le cadre de l’édiction des mesures de fouilles intégrales, afin que ces mesures restent exceptionnelles et que les personnes détenues n’aient à les subir que très ponctuellement ;
- Garantir une incarcération adaptée aux besoins des personnes détenues les plus vulnérables : les personnes en situation de pauvreté, les personnes étrangères, les personnes en situation de handicap, les personnes âgées, les femmes détenues, les mineurs
- Ces mesures doivent être mises en œuvre de manière complémentaire aux recommandations déjà formulées par la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté quant aux conditions générales de détention en France.
La Défenseure des droits est dans l’attente d’une réponse des pouvoirs publics, et veillera à la mise en œuvre de ces mesures urgentes.