Avis au Parlement

Avis sur la proposition de loi visant à renforcer les conditions d'accès à la nationalité française à Mayotte

21 mars 2025

La proposition de loi 693 visant à renforcer les conditions d'accès à la nationalité française à Mayotte a été déposée à l’Assemblée nationale le 3 décembre 2024. Adoptée par l’Assemblée nationale le 6 février 2025, elle sera examinée en séance publique au Sénat le 25 mars 2025. Dans un avis au Parlement rendu le 14 mars 2025 la Défenseure des droits alerte sur les atteintes aux droits de l’enfant et les risques de discriminations inhérents à ce texte.

Une proposition qui vient durcir des conditions déjà plus strictes pour les enfants nés à Mayotte

Sont français dès la naissance l’enfant dont l’un des parents est français (article 18 du code civil) et l’enfant dont l’un des parents est né en France (article 19-1 du code civil).

Les enfants nés en France de parents étrangers peuvent quant à eux acquérir la nationalité française à leur majorité, voire à partir de leur treize ans, s’ils ont résidé en France pendant au moins cinq ans (articles 21-7 et 21-11 du code civil).

Depuis 2018, les conditions sont plus strictes pour les enfants nés à Mayotte.

La loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 prévoit en effet un régime dérogatoire. Pour accéder à la nationalité française, un enfant né à Mayotte doit justifier de sa naissance et de sa résidence en France mais aussi de la régularité de la résidence de l’un de ses parents pendant les trois mois précédant sa naissance.

La proposition de loi 693 vient durcir encore ces conditions.

Le texte de la proposition initiale prévoit que pour qu’un enfant né à Mayotte se voie reconnaitre la nationalité française, ses deux parents doivent justifier d’une résidence régulière et ininterrompue pendant un an avant la naissance de l’enfant.

L’amendement 88, adopté lors des travaux de l’Assemblée nationale, durcit encore ce texte et impose une durée de régularité de séjour des parents de 3 ans.

Pour la Défenseure des droits, ce texte porte atteinte aux droits de l’enfant et est de nature à engendrer des discriminations

Pour Claire Hédon, « les politiques de lutte contre l’immigration des parents ne doivent pas faire obstacle au droit des enfants d’accéder à la nationalité française ». 

La condition de régularité de la résidence des parents méconnaît l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (Conv. EDH) et porte atteinte aux droits de l’enfant garantis par la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE).
Par ailleurs, l’extension de la condition de régularité de la résidence aux deux parents, et plus seulement à l’un des deux, constitue une discrimination en raison de la situation de famille. La Défenseure met également en garde contre le risque d’une exclusion de fait des enfants issus de familles monoparentales ou séparées.

Enfin, la Défenseure des droits soulève des problèmes de preuve de la régularité de la résidence des parents, notamment en raison des dysfonctionnements des services préfectoraux à Mayotte, qui compliquent la délivrance des titres de séjour.

Pour garantir les droits et libertés fondamentaux des enfants, la Défenseure des droits recommande un alignement du droit applicable à Mayotte sur le régime commun.

Consulter l'avis 25-04 

Dernières actualités