Conclusions du Comité de l’ONU pour l’élimination des discriminations à l’égard des femmes à l’issue de l’Examen de la France du 17 octobre 2023 : plusieurs recommandations de la Défenseure des droits sont reprises
07 novembre 2023
- Discrimination
- International
Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) est chargé de surveiller l’application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Un an après sa ratification, puis, en principe, tous les 4 ans, les États parties doivent remettre leur rapport de mise en œuvre de la Convention au Comité. Les institutions indépendantes et les associations nationales transmettent également leurs contributions afin d’éclairer le Comité dans les recommandations qu’il formule à l’issue de l’examen de chaque pays.
La Défenseure des droits, Claire Hédon, se réjouit de ce que plusieurs des recommandations de la contribution que son adjointe, George Pau Langevin avait eue l’occasion de présenter le 16 octobre devant le Comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes aient été reprises. Publiées le 30 octobre dernier à l’issue de l’Examen de la France qui s’est tenu le 17 octobre à Genève, les observations finales du CEDAW rappellent des positions défendues par l’institution.
Dans le domaine de l’éducation d’abord, le comité rejoint les constats de la Défenseure des droits en ce qui concerne la mise en œuvre très insuffisante de la politique d’éducation à la vie affective et sexuelle. Il recommande de renforcer la mise en place de programmes d’éducation à la santé et aux droits sexuels et reproductifs et à l’adoption de comportements sexuels responsables qui soient attentifs à la dimension de genre, adaptés à l'âge et accessibles, et ce à tous les stades du système éducatif, ainsi que la formation systématique des enseignants à ces questions, et plus généralement que soit assurée la mise en œuvre et le suivi de la stratégie nationale en matière de santé sexuelle.
Face au constat de l’augmentation sans précédent de cas de harcèlement scolaire et de cyber harcèlement, le comité invite également la France à « introduire d’urgence de nouvelles réglementations sur la protection des mineurs dans les écoles contre le harcèlement et la cyber intimidation, de sensibiliser les élèves, les enseignants et le grand public aux risques, et de suivre la mise en place de mécanismes de signalement et de traitement « zéro tolérance » en matière de harcèlement et de cyber intimidation des élèves, y compris des filles ». Ces mesures rejoignent en partie les recommandations portées par le Défenseur des droits dans ses observations ainsi que dans l’avis 21-10 qu’il a rendu sur le sujet.
Pour ce qui relève de l’égalité femme-homme dans le travail, la Défenseure des droits se félicite également du fait que le Comité, dans plusieurs de ses recommandations, fasse écho à des préoccupations portées par l’institution. Il pointe notamment les risques de reproduction des biais générés par les algorithmes de recrutement et recommande aux autorités de « réaliser des études d’impact pour traiter les effets discriminatoires des algorithmes de recrutement au détriment des femmes, et soutenir la recherche pour développer des études de mesure et des méthodologies de prévention des préjugés ».
Afin de lutter contre les inégalités salariales, le comité fait suite aux recommandations du Défenseur des droits et invite les autorités à améliorer les grilles d'évaluation et les systèmes de classification des professions majoritairement exercées par des femmes, notamment dans les secteurs de la santé, de l'enseignement et du social, et de réviser l'indice d'égalité entre les femmes et les hommes afin de relever le score minimum permettant d'être exempté de mesures correctives.
En ce qui concerne les risques de discrimination fondées sur la situation de famille, le Défenseur des droits salue la recommandation du comité qui invite à « renforcer les programmes visant à encourager les hommes à profiter du congé de paternité ». Néanmoins, constatant la persistance des recommandations liées à la grossesse, la Défenseure des droits recommandait également que soit prolongée la période légale d’interdiction de rupture du contrat de travail pour les femmes de retour de congé de maternité et d’inscrire expressément dans la loi l’interdiction faite à l’employeur d’adopter des mesures préparatoires au licenciement pendant la période de protection.
La Défenseure des droits salue également les recommandations du Comité en matière de lutte contre le harcèlement sexuel au travail, notamment lorsqu’il invite à ce que tous les cas de harcèlement sexuel signalés fassent l’objet d’une enquête effective et que les responsables soient sanctionnés de manière adéquate. Afin d’augmenter l’effectivité des procédures de prévention, le comité appelle par ailleurs à réformer la législation. Dans ce cadre, le Défenseur des droits recommande que les textes soient harmonisés afin de prendre en compte la jurisprudence qui considère qu’un seul fait peut suffire à caractériser le harcèlement sexuel s’il porte atteinte à la dignité de la personne ou crée à son encontre une situation humiliante ou offensante.
Dans ses observations, la Défenseure des droits avait regretté les obstacles à l’insertion sociale et professionnelle des femmes musulmanes voilées, interdites dans de plus en plus d’emplois, discriminées dans l’accès la formation et à l’embauche. À ce sujet, le Comité recommande aux autorités de prendre des mesures pour lutter contre les obstacles structurels auxquels se heurtent des femmes appartenant à des groupes défavorisés, et notamment les femmes migrantes ou celles appartenant à des minorités ethniques ou religieuses.
La Défenseure des droits sera attentive à la bonne application de ces recommandations.